Thérapie Brève et Intervention Systémiques (modèle de Palo Alto)

et hommage à Gregory Bateson à l’occasion du centième anniversaire de sa naissance

Bonjour et bienvenue à toutes et à tous

C’est un grand plaisir pour l’équipe de PARADOXES de vous accueillir pour cette troisième journée d’étude. Oui, trois ans déjà ! et vous n’échapperez pas à la tradition d’une brève évocation historique.

PARADOXES est une association loi 1901, née en septembre 2001 de l’enthousiasme de quatre médecins pour la Thérapie Brève de Palo Alto : Georges Elkan, pédopsychiatre et psychothérapeute à Paris, Manuela Guillot, neurologue et psychothérapeute à Lyon, Irène Bouaziz, psychiatre et psychothérapeute à Paris, et moi-même, Chantal Gaudin, psychiatre et psychothérapeute à Genève.

Je vous rappelle brièvement les activités régulières de l’association depuis sa fondation :

Nous organisons chaque année deux ateliers en jan

vier et en avril. Ils ont pour principal objectif de créer des occasions de travailler ensemble, avec des supervisions, des débats et des exercices.
Et la Journée d’Etude, qui a lieu chaque automne, a pour vocation de donner la parole aux praticiens de l’approche de Palo Alto.

Dès sa naissance PARADOXES s’est doté d’un outil de communication et d’information : notre site Internet, fruit du labeur parfois acharné de notre webmaster Martine LAROCHE que nous remercions très chaleureusement.
Ceux d’entre vous qui visitent régulièrement ce site auront remarqué que sa conception et son look ont été entièrement remaniés ce printemps pour une meilleure navigation. Le site mérite vraiment toute votre attention parce qu’il est régulièrement mis à jour, sa rubrique Manifestations vous informe de séminaires ou congrès sélectionnés, la rubrique Annuaires vous offre des noms de thérapeutes et d’intervenants formés au modèle de Palo Alto. Je vous rappelle que vous pouvez y figurer si vous remplissez les conditions requises, que je vous laisse le soin de découvrir sur le site.

Lorsqu’un membre ou l’autre de l’équipe participe à un congrès ou séminaire intéressant, un compte rendu en est rédigé pour diffusion sur notre site. C’est ainsi que vous pouvez ou pourrez y découvrir entre autres le compte-rendu de la Première Conférence Européenne de Thérapie Brève Stratégique et Systémique qui a eu lieu à Arezzo, en Italie, en novembre 2003. Cette manifestation est digne d’être relevée parce qu’elle a donné naissance à un réseau qui, à l’échelle européenne, se donne un peu la même mission que PARADOXES, de promouvoir la recherche, le développement, les échanges sur la Thérapie Brève Systémique.

Notre site comporte aussi parfois, malheureusement, une rubrique nécrologique. Nous avons eu le regret d’annoncer, en février dernier, le décès d’un grand nom de la thérapie familiale italienne, Gianfranco Cecchin, dont nous avions particulièrement apprécié les interventions lors de la conférence d’Arezzo.
Et depuis notre deuxième journée d’Etude, notre vie associative encore brève a déjà été marquée par le décès de trois amis et membres de l’association,
Hervé Gardin, à la fin de l’année dernière, Marie-Christine Aurimond et Naïma el Ouarchani cet été. Certains d’entre vous les connaissaient bien et nous voulons profiter de l’occasion de cette Journée pour avoir une pensée pour eux.

Peut-être le savez vous, cette année 2004 est celle du centenaire de la naissance de Gregory BATESON. Un anniversaire curieusement ignoré dans la francophonie, mais qui sera célébré aux États-Unis par une conférence qui aura lieu le 20 novembre à Berkeley. Vous trouverez plus d’informations au sujet de cet évènement sur le site de Paradoxes.
Au moins, nous saisissons l’occasion de cette Journée d’Etude pour y consacrer quelques minutes.
Rendons donc à Bateson ce qui appartient à Bateson.
Nul d’entre vous qui utilisez peu ou prou le modèle de Palo Alto ne peut ignorer ce que cette approche doit aux idées développées par ce chercheur et théoricien de génie, réputé pour être difficilement accessible.
À ce stade de mon propos chacun se sera remémoré la notion de double lien ou double contrainte. Ce concept, trop tôt, et trop mal présenté, comme l’a largement regretté Bateson, est un peu l’arbre qui cache la forêt des immenses implications de l’étude des paradoxes dans la communication humaine.
Mais les apports de Bateson sont bien plus larges et bien antérieurs à la parution de cet article : Vers une théorie de la schizophrénie, paru en 1956, et il n’est pas inutile de nous souvenir que notre pratique quotidienne est tout entière imprégnée de ses idées.
Dès les premières minutes d’un entretien, quand nous sommes attentifs aux interactions entre les individus dans leur système, et à celles que le ou les clients ont avec nous, à la nature symétrique ou complémentaire des relations, nous mettons en pratique les observations de Bateson- anthropologue chez les Iatmuls dans les années 30.
Notre vigilance à bien comprendre la vision du monde des clients s’inspire directement du soin apporté par Gregory Bateson dans toute son œuvre à bien distinguer et expliciter les différentes épistémologies qui construisent les réalités des uns et des autres et en particulier celles des psychiatres et des psychothérapeutes, comme il l’a remarquablement analysé dans l’ouvrage publié avec Jürgen RUESCH en 1951 : Communication et société.
La théorie globale de l’information développée dans cet ouvrage, fait de la communication un modèle scientifique regroupant les aspects physiologiques, intrapersonnels, interpersonnels et culturels en un seul et même système explicatif.
Elle trouve des implications dans les références constantes que nous faisons à ce qui a été décrit plus tard par l’équipe du Mental Research Institute de Palo Alto sous la forme des cinq axiomes de la communication :
– on ne peut pas ne pas communiquer
– tout message comporte deux niveaux d’information: le rapport et le commandement
– la communication est structurée par la ponctuation des séquences
– les êtres humains usent de deux modes de communication: digital et analogique
– toute communication est symétrique ou complémentaire .

Quand nous sommes attentifs, dans notre pratique, aux confusions de niveaux logiques dans le discours de nos clients ou quand nous utilisons la double contrainte thérapeutique avec nos prescriptions paradoxales, nous tirons directement profit des 10 ans de travaux de l’équipe Bateson sur l’application de la théorie des types logiques de Withehead et Russell dans le champ de la communication.
Si ces notions nous ont permis de concevoir le symptôme comme un trouble de la communication et de nous départir de la vision pathologisante de la psychiatrie classique, une utilisation simplificatrice et mécaniste de certains des principes qui animent notre approche peut se révéler dangereuse. D’ailleurs, Gregory Bateson était extrêmement méfiant quant aux applications pratiques de ces concepts.

Ecoutons ce que nous dit sa fille Mary Catherine dans Regard sur mes parents. « L’impératif éthique de Gregory mettait l’accent sur la complexité et sur les dangers d’une manipulation qui portât à son maximum quelque caractéristique isolée ou soutint quelque dépendance, ses exemples allant de l’administration de drogues aux schizophrènes à l’emploi des pesticides pour favoriser les exploitations agricoles de monoculture, toutes manipulations impliquant de dangereuses simplifications outrancières.»
Gardons-nous bien de tomber dans ce même piège avec nos théories constructivistes et notre nécessaire position basse, notions qui, comme toutes les abstractions, peuvent conduire à ces dangereuses simplifications ; par exemple en ignorant, au nom de la non–normativité, des souffrances et des troubles graves qui peuvent conduire à des tragédies humaines.

Je vais terminer en vous présentant rapidement le déroulement de la journée :
Nous entendrons une première communication avant la pause café-croissants qui aura lieu de 11h 15 à 11h 35. Nous assisterons ensuite à une deuxième communication puis à la désormais traditionnelle démonstration de l’application du modèle avec un temps pour les questions jusqu’à 13 h.

L’après-midi sera assez dense avec trois conférences entrecoupées d’une pause café-gâteaux de vingt minutes à 16 h 15. Et la journée se terminera vers 18h sur les propos de clôture d’Irène Bouaziz. Je vous souhaite à tous une journée passionnante, et je passe la parole à Manuela Guillot.

© C. Gaudin/Paradoxes

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