Thérapie Brève et Intervention Systémiques (modèle de Palo Alto)

Communication à la XIème journée de Rencontre de Paradoxes, 13 octobre 2012
C Chambon, consultante et coach

Qui est le «client» dans une intervention d’accompagnement d’équipe ?
Longtemps j’ai pensé que c’était celui ou celle qui «voulait que son équipe change», le dirigeant qui commandait l’accompagnement. Chemin faisant,  j’ai constaté que c’était souvent beaucoup plus nuancé que ça, que d’autres clients  exprimaient, à différents moments, des demandes de changement, et que parfois même le demandeur initial s’éclipsait, occupé à d’autres priorités.
J’exposerai, lors de cette journée, une expérience d’accompagnement dans une institution où  cette «ronde des clients» a été très active et riche en rebondissements, et notamment  comment nous avons  trouvé une manière de continuer à travailler dans la direction initiale, à une période ou les dirigeant étaient  «absents», totalement focalisés sur d’autres enjeux.

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Comme coach et consultant  je fais beaucoup d’accompagnements collectifs en entreprise et dans le monde public. Ces accompagnements m’amènent à intervenir dans des milieux de plus en plus complexes, avec de nombreux acteurs. Et aussi à me poser des questions.
Si je considère que : «Le client c’est celui qui paie », que faire alors avec tous les autres « embarqués » dans un accompagnement «parce que le chef a décidé », et qui, je le vois bien,  ne sont pas forcément pour, et trouvent très énervant que je  ne prenne pas en compte cet état de fait.

C.Chambon

L’approche systémique a assez radicalement changé ma vision des choses sur au moins trois points :

  • La définition de ce qu’est un client pour une intervention: quelqu’un qui a une difficulté ou un objectif de changement, a tenté d’y parvenir (ce que nous appelons mettre  en place des tentatives de solutions), pense qu’il  «ne sait plus quoi faire »  (ce que nous appelons être au bout de ses tentatives de solutions)  et est d’accord pour travailler avec nous – primordial -: ce qui fait beaucoup de conditions.
  • la notion qu’un système est  hiérarchisé, et donc que lorsque quelqu’un qui a une position hiérarchique dans une organisation est client pour un changement, il «  demande ce changement » à l’ensemble des acteurs du système, qui doivent donc «  sous la contrainte » changer
  • et que dans les systèmes complexes il faut se poser la question du « système pertinent »  pour l’intervention pour une demande donnée à un moment donné, la réponse n’étant pas obligatoirement « l’ensemble du système»

Sachant que nous sommes dans le cadre d’une stratégie d’intervention paradoxale qui consiste à aller à contresens des tentatives de solutions de notre client, à des degrés divers qui peuvent aller du «freinage » – ralentir le mouvement vers le changement – à des actions beaucoup plus radicales d’arrêt des tentatives de solution comme «prescrire le symptôme». Et si nous intervenons ainsi, c’est que nous pensons que notre client est très compétent et tout à fait à même de trouver « sa » solution

Je vous propose donc de partager une expérience d’accompagnement dans le monde hospitalier et notamment les « moments clés », ceux où le client et le système pertinent d’intervention ont  changé.

Plantons le décor :

  • nous avons un directeur général, et une équipe de directeurs adjoints, en charge de la gestion de l’établissement
  • nous avons des médecins, dont certains sont devenus des «  chefs de pôle »  fonction nouvelle créée en 2007, qui les engage, au-delà de la responsabilité médicale dans la gestion et le management d’entités regroupant différents services
  • parmi les médecins nous avons le président  de la CME (Commission Médicale d’Etablissement), qui est élu par ses confrères et  a un rôle clé, aux côtés du directeur général et dans la stratégie médicale de l’établissement
  • nous avons un directeur de soins, qui dirige l’ensemble des équipes soignantes : infirmières aides-soignantes…

Comment l’intervention a été décidée, au cours d’une période de 18 mois, par les responsables d’un système large et complexe ?

Les premières personnes que j’ai rencontrées étaient le directeur adjoint,  et le Président de CME :
–   Le président de CME avait un souci : il voulait que les Chefs de Pôle s’impliquent dans la stratégie et surtout dans le projet de nouvel hôpital – « on n’y arrivera pas sans eux ».
–   Le directeur adjoint partageait ce souci et leur idée de départ était de mettre en place un séminaire pour faire réfléchir les chefs de pôle de l’hôpital à la stratégie de l’établissement.

Parallèlement, ils constataient :

  • Que  certains Chefs de Pôle demandaient, individuellement,  toujours plus de formations dans le domaine du management et de la gestion
  • Et que dans l’ensemble  les Chefs de Pôle prenaient bien leur place : ils proposaient des nouveaux projets très intéressants pour leur pôle….

Mon intervention : devant cet objectif que je comprenais comme « il faut qu’ils changent  et que vous nous y aidiez»  j’ai pris l’option de freiner le mouvement vers le changement

J’ai dit  « en fait, j’ai l’impression que vos Chefs de Pôle prennent vraiment bien leur rôle ».
J’ai freiné sans précaution :

  • Je n’ai pas suffisamment pris acte de leur préoccupation, qui était double : que tous les chefs de pôle s’impliquent dans le projet nouvel hôpital et que certains cessent de demander toujours plus de formations.
  • J’ai freiné trop brutalement : je l’ai fait avant de les rassurer sur le fait que je voyais bien combien ce sujet était important pour eux.

A la suite de cette première rencontre, je leur ai transmis une note de réflexion, en leur présentant ma reformulation de la situation et la manière dont je pourrais travailler avec eux  sous la forme d’un accompagnement à deux niveaux:

  • Au niveau de la « population » des Chefs de Pôle (système  établissement) : sous la forme de  2 séminaires, un au début, et un à la fin de l’accompagnement :
    • qui ont pour objectif de créer une communauté de Chefs de Pôle et d’intégrer les Chefs de Pôle dans le management (l’organisation, les finances, le recrutement et l’évaluation des personnels…) de l‘établissement et dans le projet nouvel hôpital
    • et qui réunissent en plus des Chefs de Pôle et leur cadre supérieur de pôle :
      • Le Directeur Général
      • Le Président de la CME
      • Le Directeur des Soins
      • Tous les directeurs adjoints, dont la plupart sont en parallèle directeurs délégué de pôle
  • Au niveau de chacun des  Chefs de Pôle, (système pôle) pour qu’ils  développent leur manière propre de manager leur pôle, sous la forme d’un accompagnement léger ; il s’agit aider chaque Chef de Pôle à réussir une action utile à son pôle, et cohérente avec la préparation du nouvel hôpital car :
    • Ils ont déjà beaucoup de choses à faire
    • Ils savent déjà beaucoup de choses et n’ont besoin de très peu de support

Avec une préparation des séminaires et des points réguliers de suivi avec le Directeur Général et le Président de la CME (cohérence entre les 2 niveaux du système) :

  • Pour faire le point sur l’accompagnement et les apprentissages à l’occasion des actions dans les pôles
  • Et encore plus, pour faire un point sur le calendrier institutionnel de l’établissement : en effet, il était possible que l’actualité de l’établissement impacte ce qui se passait dans les pôles.

Mes 2 interlocuteurs  le directeur adjoint et le Président de CME,  ont décidé de parler de cette réflexion avec leur Directeur Général, qui est le décideur final. Ils ont rédigé un document  à  son intention, document qu’ils m’ont transmis

Puis, je n’ai pas eu de leurs nouvelles pendant longtemps.

Je les ai rappelés une fois tous les 6 mois pour prendre des nouvelles, au cours d’un de ces échanges ils m’ont appris que leur Directeur Général s’en allait.

Mon intervention : Lors de ces temps de prise de nouvelles, ils étaient ennuyés que cela n’avance pas plus vite ;  j’ai persisté dans le freinage, à contresens du mouvement vers le changement,  en leur disant que « la réflexion progressait, que cela prenait toujours du temps, et que c’était la seule chose que j’avais besoin de savoir ».

Une autre intervention paradoxale n’aurait pas été pertinente dans le contexte.

Ce que j’ai fait c’est : continuer à leur dire : «je comprends votre préoccupation, je vois combien c’est important pour vous, et la réflexion progresse ».

18 mois plus tard, j’ai rencontré leur nouveau Directeur Général, arrivé 6 mois auparavant et qui avait lu ma note de réflexion et donc savait le genre de support que je pouvais lui apporter, à lui et ses équipes. Il était moins préoccupé du  projet de nouvel hôpital et avait un autre objectif : « J’aimerais que les Chefs de Pôle s’impliquent dans le management de l’établissement – (l’organisation, les finances, le recrutement et l’évaluation des personnels…), prennent à leur compte une partie de la gestion (dépenses de médicaments, organisation des équipes soignantes et médicales du pôle…), que je leur déléguerai, et travaillent avec la direction sur  les projets stratégiques».

Le Directeur Général m’a informée qu’il attendait un nouveau Directeur des Soins (responsable des équipes soignantes).

Mon intervention : j’ai freiné en lui disant « Vous avez raison, il faut faire cela au bon moment ».

Comment l’intervention a débuté  par une action intéressant le système global

Nous avons  attendu l’arrivée du Directeur des Soins et avons débuté l’accompagnement par un séminaire réunissant en plus des Chefs de Pôle et leur cadre supérieur de pôle, le Directeur Général, le Président de la CME, le Directeur des Soins, et tous les directeurs adjoints.

Pour la conception du séminaire, nous avons pris le soin de mener plusieurs réunions de préparation à 3, avec : le Directeur Général, le Président de la CME et le Directeur des Soins, selon la volonté du DG.

Ce temps de préparation avec le DG, le Président de la CME et le Directeur des Soins a constitué un temps d’ajustement très important pour :

  • Que le séminaire soit comme eux le voulaient
  • Qu’ils y occupent leur juste place.

Au cours du séminaire de lancement :

  • Certains Chefs de Pôle  ont répondu à la demande de leurs dirigeants  car ils ont trouvé de l’intérêt au projet de l’établissement et ont choisi de s’impliquer :
    • Le DG et le Président de CME leur ont dit : « On a besoin de vous pour le projet du nouvel hôpital ».
    • Ils ont répondu : « Oui, cela m’intéresse et je n’ai pas envie que cela se fasse sans moi ».
    • Ils n’ont pas forcement répondu «  cet accompagnement peut être une ressource »à ce stade.
  • Certains Chefs de Pôle  ont été intéressés parce qu’on pouvait enfin parler de ce projet de nouvel hôpital : « Enfin on parle de ce projet qui, jusque-là, a été uniquement mené par l’administration ! On en parle ET notre Président de CME nous en parle ! »

Comment certains Chefs de Pôles sont devenus « clients » et pour quoi ?

Lors d’une intervention systémique, le client initial (en général le Directeur Général qui est également le commanditaire) ne reste pas le seul  «client » :

  • Il peut arriver que les clients initiaux n’aient plus de besoin, ou plus de besoin urgent : ce qui s’est passé leur permet d’avancer, ou d’être suffisamment sûr que cela avance dans le sens qu’ils souhaitent; ils « décrochent »…
  • D’autres « clients » ou demandeurs  peuvent apparaître.

La mission restant toujours au service global de l’institution.
Et c’est ce qui s’est passé après le premier séminaire : le DG, le Président de la CME étaient rassurés sur l’implication des chefs de pôle, notamment dans le projet de Nouvel Hôpital. Ils ont laissé l’intervention se dérouler avec juste quelques  réunions de pilotage.

A ce stade l’intervention s’est faite dans différents  systèmes : chaque pôle a été traité comme un système et tant que tel,  avec des  participants contraints et « clients » potentiels : les chefs de pôle, qui ont eux-mêmes une équipe de management  de pôle (le trio de pôle).

Certains Chefs de Pôle m’ont demandé de l’aide pour la réussite de leur projet à eux :

  • Un Chef de Pôle – qui avait le directeur adjoint comme directeur délégué de pôle – s’était engagé sur un projet.
  • Tous les deux  demandaient de l’apport de conseil en gestion de projet ; je constituais une ressource supplémentaire pour faire réussir leur projet.

Mon intervention : j’ai fait ce qu’ils m’ont demandé, avec une démarche d’intervention à minima :

  • Je me suis intéressée de très près à ce qu’ils faisaient.
  • J’ai veillé à les comprendre et à voir où ils avaient une interrogation éventuelle : ils voulaient faire plus de choses que ce qu’ils faisaient déjà.
  • Je ne leur ai pas conseillé de faire différemment de ce qu’ils avaient envisagé et leur ai dit « surtout n’en faites pas davantage, ce que vous avez fait est très bien».

Un Chef de Pôle a demandé de l’aide car il avait l’impression que son action stagnait.

Mon intervention : J’ai investigué avec lui et son trio de Pôle :

  • Ce qu’ils avaient déjà fait
  • Et ce qui leur posait difficulté pour la suite

Et cela a suffi pour qu’ils puissent continuer. Cette intervention a été une sorte de recadrage.

Certains Chefs de Pôle ont demandé à ce que je les aide à structurer ce qu’ils avaient déjà fait.
J’ai fait ce qu’ils me demandaient.

Un Chef de Pôle avait besoin de valorisation dans ce qu’il faisait.
Je l’ai aidé par le questionnement et la reformulation à clarifier ce qu’il avait fait, pour qu’il puisse en parler.

Certains Chefs de Pôle n’ont été ni clients, ni pas clients, mais se sont investis par discipline et/ou opportunisme – « Après tout, c’est un bon moment pour travailler sur cette action » :

  • J’ai travaillé avec eux en leur disant : « Nous avons 1h30. Que pouvons-nous faire ensemble qui va vous aider pour faire avancer  votre projet ? » C’est une intervention de repositionnement dans le système général.  J’ai raisonné de la manière suivante  le DG a décidé que nous devions travailler ensemble, je ne prétends pas qu’ils soient volontaires, mais puisque je suis là  que pouvons-nous faire d’utile.
  • Dans un cas l’apport a juste été de les faire travailler tous les 3 ensemble (Chef de Pôle / Cadre Supérieur de pôle / Directeur référent du pôle):
    • L’action portait sur le thème de la renégociation des horaires du personnel
    • Le Directeur référent du pôle avait été DRH et responsable syndical dans 2 anciennes vies professionnelles distinctes

Mon intervention : La seule chose que j’aie faite a été de dire qu’il représentait une compétence vraiment intéressante pour la réussite du projet du pôle.

  • Certains ne sont jamais devenus clients : un Chef de Pôle a « décroché » et n’a jamais réalisé ce sur quoi il s’était engagé.

Pour répondre aux demandes des chefs de pôle, j’essaie de garder  à l’esprit  que nous sommes ensemble parce que la direction en a décidé ainsi, et je me demande systématiquement :

  • « Est-ce que ce qu’ils me demandent-ils va dans le sens de  la demande de l’institution ?
  • « A quoi je peux répondre ou pas, est-ce que je sais faire ? »
  • « Est-ce qu’il est pertinent de mettre en place un stratégie paradoxale, ou pas ?»

Cette approche me donne un grand éventail dans les réponses qui peuvent être apportées, y compris du conseil, de la formation… aux chefs de pôle, sans préjugé sur leurs motivations.

Un cas imprévu en dehors des Chefs de Pôle :

  • Le directeur adjoint est devenu « client » pour apprendre à faire de l’accompagnement, tout en se formant en parallèle.
  • J’ai dit OK, pour partager avec lui au moins une partie de  ce que je faisais et pourquoi.

Le moment où tout allait mal et ou une intervention imprévue s’est avérée nécessaire sur le système global

Les alertes :

4 à 5 mois avant le séminaire de clôture, plusieurs alertes me sont parvenues de sources différentes :

  • Lors d’une étape d’accompagnement, des Chefs de Pôles m’ont exprimé leurs doutes et questionnements : « On ne comprend pas où l’établissement veut aller ni où le Directeur Général veut aller».
  • En parallèle, le directeur adjoint m’a dit qu’il avait eu des plaintes sur le manque de visibilité globale et des questions sur l’utilité de poursuivre ces actions, de travailler avec l’accompagnatrice.

A ce moment-là, j’ai engagé un dialogue avec le directeur adjoint et lui ai fait part de mon constat :
« Effectivement, les Chefs de Pôle que j’ai rencontrés disent qu’ils ne voient pas la cohérence de tout ce qui est lancé. Aujourd’hui, on ne leur parle pas de cette cohérence.
Je pense que vous lancez des choses qui sont cohérentes entre elles. Ce qui manque, c’est que cette cohérence n’est pas très lisible. Elle n’est pas non plus très lisible pour moi, et je ne suis pas en mesure de répondre aux questions que me posent les Chefs de Pôle
».

J’ai donc proposé au  directeur adjoint de parler au directeur des Projets pour savoir si ce dernier serait d’accord pour que nous travaillions tous les 3 à dessiner la cohérence des projets menés par l’établissement entre eux.
Le directeur des Projets ayant donné son accord, j’ai dit à mes 2 interlocuteurs : « Je suis d’accord pour que nous fassions ce travail à 3, mais j’ai besoin d’en parler avant au Directeur Général qui est le commanditaire de la mission ».

Par ailleurs, le directeur adjoint  a également évoqué notre proposition à son Directeur général.

J’ai donc échangé avec le Directeur Général et lui ai fait part :

  • De ce que j’avais observé dans mes accompagnements
  • De la teneur de mes échanges avec le directeur adjoint
  • De la proposition que je lui faisais à ce stade : faire avec le directeur adjoint et le directeur des Projets la cartographie des projets en cours, pour amener aux équipes de la clarté et de la cohérence
  • Du fait que nous étions d’accord, le directeur adjoint et moi, que c’était une bonne approche.

Il a donné son accord.

Mon intervention :
La question posée m’a amenée à changer de système pertinent pour l’intervention, nous n’étions plus dans des interventions dans le système «  pôle » mais dans une intervention dans le système initial, pour répondre à une question posée par la « population des chefs de pôle »

Les travaux menés et les résultats :

Nous avons tenu à trois une session de travail de 2 à 3 heures et avons réalisé la cartographie des projets en cours, en mettant en évidence les liens entre les projets.

En termes de méthodologie, ce travail n’a donné lieu à aucune formalisation de ma part :

  • De notre séance, seuls sont restés les croquis sur paperboard
  • Si j’avais formalisé quelque chose, j’aurais envoyé le message implicite que j’ai fait un travail qu’une personne de l’établissement aurai dû réaliser.

Ce travail m’a permis, dans mes accompagnements ultérieurs, de dire aux chefs de pôle :

  • « Voilà comment j’ai compris que  les différentes projets se situent et s’articulent »
  • « Voilà comment il me semble que ce que nous faisons ensemble est lié aux autres projets »

Ce travail, qui a montré  la cohérence, s’est fait dans un contexte où le Directeur Général de l’établissement  avait d’autres priorités et ne songeait pas à partager avec ses Chefs de Pôle la cohérence d’ensemble.

Quelques mots sur le séminaire de clôture qui est revenu au système au global

L’accompagnement a repris au niveau de chacun des pôles, et est venu le temps du séminaire de clôture et, là, il s’est passé quelque chose d’intéressant : tous ceux qui avaient été les « prescripteurs historiques » de la mission, ont «  réapparu ». Ils :

  • Considéraient que c’était très important que ce séminaire ait lieu
  • Et  considéraient ce séminaire comme un point d’étape.

Dans mon esprit, il s’agissait d’un séminaire de clôture, dans le leur, il s’agissait d’un point d’étape.
Je leur ai donc  demandé s’ils voulaient continuer quelque chose. Le Directeur Général m’a répondu : « Oui, je veux continuer car nous avons constitué un collectif des chefs de pôle et des directeurs adjoints, et je veux pouvoir continuer à travailler avec ce collectif».

Le Directeur Général avait construit là une équipe qu’il sollicitait régulièrement sur des questions de conduite générale de l’établissement, telles que :

  • Le plan de retour à l’équilibre
  • Des questions de politique de rémunération.

Il s’appuyait déjà, pour animer cette instance, sur le directeur adjoint.

Du fait que :

  • le directeur adjoint était devenue « client » pour apprendre à faire de l’accompagnement
  • Et que ce séminaire constituait pour eux un point d’étape.

J’ai proposé que lui  et moi nous construisions ensemble et co-animions ce séminaire de point d’étape.

Nous avons à nouveau préparé ce séminaire de point d’étape avec le même dispositif que pour le séminaire de lancement, c’est-à-dire avec le Directeur Général et le Président de CME, le directeur des soins avait quitté l’établissement.

Ce que nous leur avons proposé pour ce séminaire, c’est de passer du temps à partager sur :

  • Tout ce qui avait été construit et réussi jusque là
  • Et tout ce qui devait être fait après le séminaire.

Cette approche permettait de répondre à une double demande :

  • Celle du Directeur Général : « Moi, je veux travailler avec cette équipe parce que j’ai besoin qu’ils s’impliquent dans le management et la gestion de l’établissement »
  • Celle du Président de CME, toujours client pour la même chose : « Je veux qu’ils s’impliquent dans le projet du nouvel hôpital ».

Concrètement, cette étape de partage s’est traduite par une grande fresque, dans laquelle chacun des Pôles ET AUSSI chacune des Directions fonctionnelles :

  • A noté :
    • Ses réalisations-clés
    • Et les grands jalons à venir
  • Et les a positionnés sur une échelle  (de -10 à +10) de contribution  aux objectifs stratégiques de l’établissement, dont le nouvel  hôpital
  • Constitué, de ce fait, une sorte de « reformulation recadrante» de tout ce qu’ils avaient déjà fait. Ce qui rend cette reformulation encore plus puissante, c’est que ce sont les participants du séminaire eux-mêmes qui l’ont faite.

En guise de conclusion

Ce qui a vraiment changé ma manière d’intervenir et relève pour moi de l’intervention systémique peut se  résumer  sous la forme de deux questions :

  • Qui est client pour quoi ?
  • Quelle position occupe cette personne dans le système, et donc quel est l’endroit du système pertinent pour l’intervention ?

Dans cette intervention il y a des clients au sens « paradoxes » du terme : le DG , le Président de la CME, le directeur adjoint et d’autres participants, pas forcément clients à notre sens, mais potentiellement intéressés par quelque chose.
Et ce que j’ai compris peut-être de plus important c’est qu’il fallait leur donner, si c’était dans mes compétences et si cela allait dans le sens général, ce qu’ils demandaient… sans se priver à l’occasion de paradoxer en douceur.

Une autre chose est vraiment utile pour mes interventions, c’est la conviction que les clients sont compétents. Et donc qu’un accompagnement utile est un accompagnement discret, avec des interventions «  juste ce qu’il faut  là où il faut ».

Et cela m’incite à

  • Avoir  la patience d’essayer de bien investiguer la question qu’ils me posent
  • Porter une attention particulière à ce que les actions que je mène dans ce cadre collectif et complexe ne contiennent pas un implicite qui ressemblerait à  « quelqu’un en interne aurait dû le faire ! »

© C Chambon/Paradoxes

Pour citer cet article : C Chambon : La ronde des clients. 2012. www.paradoxes.asso.fr/2012/10/la-ronde-des-clients/
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