Thérapie Brève et Intervention Systémiques (modèle de Palo Alto)

Communication à la XVIIIème journée de rencontre de Paradoxes, le 12 octobre 2019.
Catherine Conti, consultante, coach et formatrice.                  

Pierre-Jacques Barthe, consultant, coach et formateur.

Dans le monde complexe des organisations, avec de nombreux acteurs et des demandes de changements tous azimuts, la vision systémique propose aux managers une nouvelle lecture des situations qu’ils vivent.
Cette approche, en se focalisant sur les interactions dans un contexte donné, conduit à une nouvelle compréhension des situations et de nouveaux moyens d’action.
En réfléchissant en termes de messages échangés et de demande contenue dans chaque message, les managers peuvent éviter beaucoup d’incompréhensions et d’actions contre-productives. Ils démontrent davantage de hauteur de vue, d’anticipation et de capacité d’adaptation.
Au travers de témoignages de managers qui l’expérimentent avec nous, nous montrerons comment la vision systémique permet non seulement de clarifier, dans chaque contexte, ce qu’ils attendent des autres et ce qui est attendu d’eux, mais aussi de moduler leur communication pour plus d’efficacité.

INTRODUCTION

Commençons par la fin
Sophie s’exprime la première et dit : « Lors de mes prochains entretiens avec mes collaborateurs, je vais être beaucoup plus attentive à ce qu’ils me demandent de faire précisément et, si je ne comprends pas, alors je questionnerai pour obtenir cette information. Souvent je m’arrête avant dans mon questionnement, je me contente de ce que je comprends de leur demande en général… ».
Vient ensuite le tour de Jacques : « J’ai une décision à prendre : savoir si je fais participer un de mes collaborateurs au futur Comité de Direction ? En me posant la question en ces termes : « Quels messages je lui envoie et j’envoie aux autres membres du Codir si je le fais participer ? » et bien j’ai des pistes pour m’aider à faire un choix !
Pierre-Etienne continue le tour de table final… « Tout est beaucoup plus clair désormais pour moi. Je n’avais aucune conscience de ma façon de mettre mes collaborateurs en difficulté par les messages implicites de ma communication ».

CC, PJB XVIIIe Rencontre ©Paradoxes

CC, PJB XVIIIe Rencontre ©Paradoxes

Ce que nous disent les participants à nos ateliers de sensibilisation à la systémique pour Managers n’est pas uniquement de l’ordre de « nous sommes satisfaits ». Les personnes avec lesquelles nous travaillons évoquent souvent deux points dans leur feedback :

  • L’apparente simplicité et donc l’accessibilité perçue de l’approche utilisée pour aborder la complexité de leurs situations, ce qui leur donne envie de poursuivre dans la maîtrise du mode de pensée proposé. Ils se saisissent avec rapidité de notions directement applicables dans leur métier y compris dans des situations complexes. Une sorte de « quick win » leur permettant de savoir quoi faire dans l’exercice de leur fonction managériale.
  • Le sentiment d’être en position de faire émerger leurs propres solutions, en accord avec leur vision du monde et leurs connaissances. Ils témoignent en fait que cette approche leur apporte un mode de raisonnement différent qui leur permet de trouver des solutions qui leur sont propres et adaptées à leur contexte.

L’approche systémique appliquée au management n’est pas nouvelle, mais elle prend sans doute encore trop peu de place dans les formations et ateliers dédiés aux managers. Notre hypothèse est que cette approche demande un véritable changement de référentiel de pensée, une autre façon de raisonner qui n’est pas habituelle ou instinctive au regard des référentiels qui régissent le management actuellement. Elle requiert, par ailleurs, une discipline, une grande rigueur et le respect de fondamentaux incontournables.
Par cette communication, nous vous proposons de partager les bases de travail sur lesquelles nous avons élaboré un atelier de sensibilisation des managers à l’approche systémique. Nous vous présenterons les séquences de cet atelier et les apprentissages qu’elles ont permis. Enfin, nous expliciterons la façon dont une vision systémique conduit à raisonner différemment et les résultats que cela produit, en particulier avec des managers « pris » dans des demandes de changements tous azimuts, dans des contextes en évolution eux aussi.  

L’ENTREPRISE QUI VOULAIT UN ATELIER POUR FAIRE CHANGER SES MANAGERS

Genèse
Un responsable du développement RH souhaite créer un atelier à destination de ses managers. Il a actuellement en charge la transformation de son entreprise qui, d’une part, porte sur la structure de l’organisation et, d’autre part, a également pour ambition de faire évoluer le modèle managérial. Il est demandé aux managers de développer la coopération et de revoir la chaine décisionnelle afin d’assurer des prises de décision au « bon niveau ».
Dans son entreprise, il voit l’approche systémique comme le moyen approprié pour aider les managers à devenir plus coopératifs, dans un environnement qui se complexifie et qui risque donc d’amener les acteurs à défendre voire à durcir leurs positions. Alors qu’un des mantras de la transformation est d’aller vers davantage de co-construction, il perçoit le risque que certains managers s’arc-boutent sur des positions tranchées.
Notre client est persuadé que le décodage systémique pour les managers peut générer de multiples bénéfices tels que :

  • Résoudre des problèmes dits « complexes » : multi-acteurs, multi-niveaux hiérarchiques…
  • Identifier des acteurs avec lesquels coopérer pour trouver des solutions aux situations problématiques.
  • Élargir leur champ de vision pour gagner en anticipation et en solutions innovantes.

Ce responsable de développement RH a déjà développé une offre de formations, d’ateliers, de programmes de coaching très fournie. Il est expert dans la conception et le pilotage de ces projets. Il connaît tout un ensemble de méthodes, de techniques et d’approches qui viennent en soutien des objectifs de la Direction du Groupe.
Il connait par ailleurs l’approche systémique et il présuppose que sa maîtrise par les managers serait un levier d’efficacité. Il souhaite monter une journée « pilote » sur ce thème.
Devant les ambitions très élevées de notre client, nous prenons soin de lui dire que nous ne pouvons pas nous engager sur de tels objectifs. Il est impossible de garantir que cette unique journée puisse créer tous ces effets. Nous l’invitons ainsi à réduire ses attentes et à décrire ce que serait un premier résultat tangible et satisfaisant après une telle journée de sensibilisation : « Si déjà ils imaginent des applications concrètes de cette approche dans leur mission, ce serait bien… » dit-il.

L’approche systémique est riche et comporte de multiples aspects. Que choisir d’enseigner aux managers ?
Comme nous considérons que les managers ne sont ni des coachs ni des thérapeutes, de la totalité de l’Intervention Systémique Paradoxale nous n’avons retenu que ce qui concerne la systémique ainsi que quelques éléments de la théorie de la communication.
Distinguer cybernétique et systémique, passer en revue toutes les propriétés des systèmes et leurs implications pratiques, exposer la théorie de la communication qui découle des prémisses constructivistes et systémiques ne nous paraissait évidemment pas adapté à une telle demande.
D’un autre côté, comment faire comprendre certains concepts sans en expliquer les fondements ? Comment enseigner une pratique sans l’appuyer sur des bases théoriques solides ? Comment simplifier sans déformer ? Toutes ces questions nous ont mis dans un véritable dilemme : Que choisir ? Que garder ? Qu’abandonner ?

Pour répondre à ces questions nous nous sommes appuyés essentiellement sur notre expérience, nos observations de l’accompagnement des managers et des équipes que nous avons mené jusque-là. De quoi pouvaient-ils avoir besoin ?
Avec notre connaissance des managers nous avons imaginé des situations pour lesquelles une approche systémique pouvait leur être utile. Nous avons identifié trois principaux axes de travail :

  • Regarder l’organisation par les relations: les managers sont parfois confrontés à des organisations complexes et pas toujours lisibles avec une multitude d’acteurs et de demandes dans tous les sens. Les séminaires d’équipe que nous avons animés nous ont montrés que construire une représentation systémique, soit au niveau des entités d’une organisation, soit au niveau des acteurs de cette organisation, pouvait à elle seule, apporter un autre regard, changer la perception d’une situation et faire émerger de nouvelles solutions.
  • Distinguer les différents niveaux de communication: les managers sont au cœur du système relationnel de l’entreprise. Que ce soit avec leurs responsables, avec leur équipe ou avec leurs pairs, ils doivent négocier des instructions, faire appliquer des consignes, contrôler, valider des données … Ces activités nécessitent une précision dans la communication dans des circonstances parfois difficiles. Sur la base de ce constat, faire la distinction entre implicite et explicite et surtout identifier les injonctions dans les messages échangés nous ont parus des éléments clés à faire figurer dans les apprentissages de cet atelier.
  • Décrire plutôt qu’analyser: nous avons fait le constat que parfois l’un des freins à la résolution de problèmes relationnels était le réflexe, que beaucoup de managers ont développé, de rechercher les causes du problème, par exemple en utilisant les « Cinq pourquoi ». Enseigner aux managers comment rester au niveau de la description de ce qui se passe en racontant de façon factuelle les situations sans être dans l’interprétation ou l’explication, était le troisième des piliers sur lesquels nous souhaitions baser notre atelier.

Partis pris et hypothèses
En partant de ce besoin et de ces sujets prioritaires de travail, nous avons construit un atelier fondé sur les principes suivants :

  1. Notre objectif n’est pas de former des managers au coaching, ni de les transformer en manager-coach capables de résoudre tous les problèmes humains que leur soumettent leurs collaborateurs. Nous les sensibilisons à regarder de manière systémique leurs situations. La conséquence immédiate de ce choix amène à distinguer clairement deux types de situations : celles où les managers ont eux-mêmes des difficultés à faire passer un message à un interlocuteur (collaborateur, N+1, pairs…) et celles où leurs collaborateurs leur soumettent des difficultés. Dans le deuxième type de situation, nous sommes très vigilants à ce que le manager reste dans son rôle de hiérarchique vis-à-vis de son collaborateur.
  2. Porter un regard systémique sur une situation c’est, de façon très simplifiée et partielle :
    • Écouter son interlocuteur d’une certaine manière, sur une « fréquence systémique », en étant particulièrement attentif à certains éléments de son discours : les messages échangés entre les protagonistes (ce qu’ils se demandent, ce qu’ils se répondent…), les comportements insatisfaisants et satisfaisants …
    • Se garder d’expliquer le comportement d’un protagoniste par un trait de sa personnalité mais le considérer comme une adaptation à un contexte, le résultat d’interactions avec une autre personne ou un ensemble de personnes, par exemple dans le cas d’une demande générale de transformation organisationnelle.
    • Ne pas croire à des scénarios définis d’avance ni pour expliquer par le passé, ce qui est aujourd’hui, ni pour prédire l’avenir. Considérer que les possibilités sont multiples, qu’il est impossible de savoir ce que tel comportement ou tel message va produire.

Sur un plan pédagogique, nous nous sommes tenus à l’idée de bout en bout que nous ne savions pas ce que cette expérience allait produire auprès des participants. Notre engagement était de transmettre et de faire appliquer ces principes de manière rigoureuse à des situations réelles, vécues dans un contexte professionnel.

L’EXPÉRIENCE DE L’ATELIER VÉCUE AVEC LES MANAGERS

Les principales étapes de l’atelier :

  1. Une démonstration: un participant expose une situation actuelle, qui lui pose questio L’intervenant représente au fur et à mesure la situation par un schéma systémique. Il questionne pour identifier les éléments manquants afin d’obtenir un schéma complet des interactions.
  2. Un guide pédagogique: un apport synthétique pour réaliser un schéma systémique complet d’une situation.
  3. Une mise en pratique sur des cas simples pour lesquels nous avons demandé aux participants de suivre ce guide et d’identifier les ordres contenus dans les messages échangés.
  4. Des mises en pratiques sur les cas apportés par les participants.
  5. Un recensement des apprentissages de la journée et des idées d’application de ces apprentissages dans des situations professionnelles.

1. Démonstration :
La démonstration permet d’illustrer la réalisation d’un schéma systémique sur la base de la situation décrite par Isabelle, l’une des participantes. A partir du schéma, nous lui posons des questions pour rechercher les informations manquantes sur les messages échangés, comme par exemple :

  • « Quand tu dis que tu as essayé de temporiser avec Gilbert, qu’est-ce que tu attendais qu’il fasse ? »
  • « Qu’a répondu le service informatique à ta demande d’aide concernant l’outil déployé ? » 
  • « Quand tu demandes à Laurence de coopérer davantage, qu’attends-tu d’elle précisément ? »
  • « Que fait Véronique lorsque tu lui demandes de prendre le lead sur un sujet qui n’avance pas ? »

Nous avons questionné sur l’ensemble des relations avec les acteurs évoqués et, chemin faisant, Isabelle identifie un acteur avec lequel elle pense ne pas avoir été suffisamment précise dans sa demande d’aide et de coopération. A partir de ce moment, elle voit très bien la prochaine étape qu’elle envisage de mettre en œuvre. Elle évoque également qu’elle perçoit plus clairement ce sur quoi elle se focalise prioritairement et ce qu’elle omet de préciser ou de questionner dans sa vision initiale de sa situation.

2. Guide pédagogique
Pour les besoins de cet atelier, nous avons conçu et présenté aux participants un petit guide pratique permettant de construire un schéma systémique. Il décrit de manière précise, étape après étape, la construction d’une telle représentation.

Les étapes sont les suivantes et pour chacune, une marche à suivre détaillée est indiquée :

  • Quels sont les protagonistes de la situation ? dans quel contexte se trouvent-ils ?
  • Quels sont les messages échangés (verbaux et non verbaux) entre chacun des protagonistes ?
  • Quelles injonctions adresse aux autres protagonistes du système celui qui vous expose la situation ?
  • Quelles injonctions vous adresse celui qui vous expose la situation ?
  • Quelles sont les réponses des protagonistes aux injonctions adressées par celui qui vous expose la situation ?
  • Identifiez les interactions dans lesquelles la réponse aux injonctions est négative.

Le choix de fournir ce guide après l’expérimentation a été judicieux. Les participants ont pu illustrer et intégrer plus aisément ce qui peut sembler un jargon un peu abrupt au premier abord.

3. Mini cas d’école
Le passage par l’étude de cas est pédagogiquement intéressant et permet de saisir cette façon de penser sans être pris dans ses propres difficultés. Lors de notre atelier, nous avions prévu quelques courtes séquences à la suite de l’apport structurant sur la vision systémique et ses implications. Les participants se mettaient à la place d’un manager, dans un contexte spécifique, de façon à identifier les différents messages échangés. Tous les cas utilisés dans cet atelier sont construits à partir de cas réels issus de notre propre expérience.
Par exemple, nous leur avons demandé d’imaginer toutes les injonctions potentielles contenues dans un verbatim à partir d’une histoire :
Vous êtes Michel, manager d’une activité avec plusieurs collaborateurs répartis sur tout le territoire (4 Responsables de régions). Après une période de tension commerciale qui a duré 2 ans, le marché est reparti à la hausse. Les équipes en effectifs réduits font face aux nouvelles demandes des clients mais commencent à s’essouffler, en manque de ressources. De haute lutte, vous avez obtenu un budget supplémentaire pour recruter en particulier dans 2 régions et vous en avez informé les collaborateurs concernés avec soulagement. Dans un mail il y a 10 jours, vous avez dit : « La période difficile est passée, un budget supplémentaire vient d’être accordé qui sera employé pour de nouveaux recrutements ».                 
3 semaines passent et l’un de ces collaborateurs, Florent, vous appelle :
« On a de gros problèmes … 2 clients qui nous mettent beaucoup de pression sur les chantiers en cours… Tu n’es pas sans savoir que nous sommes en manque de ressources depuis déjà 18 mois, les gars n’en peuvent plus et en plus, ils se font incendier, c’est inacceptable »
Il s’agit donc dans un premier temps, pour les participants, d’imaginer toutes les injonctions implicites potentiellement contenues dans le message de Florent à Michel et à qui ces injonctions peuvent être adressées.

En cours d’atelier, nous obtenons une liste assez fournie :
« Aide-moi ! Rassure-moi ! Parle aux gars ! Soutiens les équipes ! Appelle les clients ! Embauche davantage de personnes ! Accélère le recrutement ! Précise-moi combien de personnes vont être recrutées ! Dis-moi combien de personnes vont arriver dans l’équipe et quand ! Sors de ton bureau, viens sur le terrain ! Intéresse-toi à mon problème ! … »

Nous soulignons que certaines injonctions sont très génériques telles que « Aide-moi ! », « Rassure-moi ! » ou « Intéresse-toi à mon problème ! »  Elles nécessitent des précisions à la fois pour identifier quelle action est attendue et par qui elle doit être réalisée. L’objectif dans ces schémas est de préciser qui attend quelle action concrète de la part de qui dans la situation.
Dans un second temps, toujours à la place du Manager Michel, les participants sont invités à réfléchir aux types de questions qu’ils pourraient poser à Florent pour faire préciser l’injonction adressée au cours de l’appel.
Les managers participants se sont prêtés au jeu, témoignant que pratiquement jamais ils n’avaient ce genre d’analyse de leurs interactions au quotidien. Ils ont été d’autant plus intéressés de voir les différences possibles dans leur communication que nous avons partagé la suite de l’histoire dans le 3ème temps, car dans la vraie vie, Michel avait rétorqué tout de go et énervé : « … mais tu ne m’as pas entendu ! les ressources vont arriver, arrête de te plaindre, c’est pénible à la fin … tu es là pour temporiser. »
Dans cette séquence pédagogique d’une demi-heure, les participants, tous managers, font le constat qu’il peut exister un lien entre bien identifier ce que les uns attendent des autres précisément et mieux coopérer. Comment favoriser la coopération si déjà ce que nous attendons les uns des autres n’est pas clair ? Comment demander à quelqu’un d’apporter sa contribution à un projet si nous ne sommes pas précis dans ce que nous attendons de lui ? Parfois nous n’obtenons pas le soutien d’un acteur alors qu’on est certain de lui avoir demandé son aide…

Cette première conclusion appelle un apport pédagogique complémentaire à partir de la question d’un des participants : « Que se passe-t-il dans les situations où les demandes sont clairement explicitées et comprises mais nullement suivies d’effets ? ».
En raisonnant sur la question : « Qu’est-ce qui fait qu’un interlocuteur ne répond pas de manière satisfaisante à une demande claire ? », nous avons pu faire un apport supplémentaire fondamental. Nous les avons ainsi amenés à distinguer les différentes possibilités : l’interlocuteur ne répond pas correctement à la demande parce qu’il ne sait pas ou parce qu’il ne peut pas ou encore parce qu’il ne veut pas. En déterminant quels types de questions poser à chaque étape et pour chacun de ces cas de figure, nous leur avons donné quelques clés très utiles pour faire face à des interlocuteurs qui semblent être en posture de « blocage ».
Cet apport théorique pourrait faire l’objet d’un deuxième guide méthodologique qui répondrait aux types de situations dans lesquelles un manager rencontre des difficultés à faire passer un message. Ce guide illustrerait un des principes de la communication : tout message contient un ordre. Il détaillerait le raisonnement à tenir en cas de réponse négative d’un interlocuteur, alors que la demande qui lui est adressée est claire.

CLÔTURE DES ATELIERS

A la fin des ateliers, les managers s’expriment sur les apprentissages et les bénéfices perçus à raisonner avec une approche « systémique » : A la fin des ateliers, les managers s’expriment sur les apprentissages et les bénéfices perçus à raisonner avec une approche « systémique ». Ce qu’ils ont retenu :

–       Écouter différemment leurs interlocuteurs (collaborateurs, pairs, chefs, …) en se demandant systématiquement : « Qu’attend-il que je fasse concrètement quand il me dit cela ou quand il se comporte comme ça » et ne pas s’arrêter à une analyse de besoins « psychologiques » enseignée classiquement.

–       Élargir la vision à des protagonistes auxquels ils ne pensent pas forcément et se demander systématiquement : « Qui est impliqué dans cette histoire ? », leur permet d’identifier d’éventuels acteurs auprès desquels agir.

–     Sortir d’une démarche de recherche de causes pour se mettre dans une approche descriptive de ce qui se passe, se dit et s’échange. « Sur cette base je fais d’autres hypothèses ».

–       Se questionner sur la clarté et la précision de leurs propres demandes et faire accuser réception par leurs interlocuteurs.

–       Voir les relations sous forme de messages et ne pas chercher à interpréter, peut ouvrir de nouvelles solutions auxquelles ils n’auraient pas pensé sinon.

–      Traduire les comportements sous forme de messages envoyés peut aider à faire des choix.

–       Repérer des implicites qui peuvent être ambigus et les faire expliciter.

CONCLUSIONS

Les managers sont pris dans des situations de plus en plus difficiles à comprendre et à appréhender. La pression est forte entre le devoir d’être performant, que son équipe le soit, que son N+1 soit satisfait, que les pairs soient respectés, que les individus dans les équipes soient « heureux » parce que leur qualité de vie a été respectée… Au final, les marges de manœuvre semblent assez faibles et les encadrants que nous rencontrons ont souvent du mal à « y voir clair », malgré un travail intense pour y parvenir.
Pour les managers, il nous semble qu’avoir les clés pour adopter une vision systémique de leur environnement de travail a plusieurs bénéfices parmi lesquels :

  • Disposer d’un mode de raisonnement « tout terrain » qui s’adapte à chaque contexte. C’est rassurant pour soi et pour les équipes.
  • Faire baisser une forme de pression liée au fait de n’y plus rien comprendre. Avec cette approche qui décrit ce qui se passe, le manager trouve de nouvelles capacités d’analyse et de communication.
  • Avoir un temps d’avance et démontrer une meilleure compréhension des situations. L’identification de tous ces ordres implicites potentiellement échangés invite le manager à enrichir sa communication de ce qu’il comprend de ce que l’autre ou les autres lui demandent. De ce fait, il permet de faire avancer plus efficacement les sujets, en limitant les sentiments de mal-être souvent liés au fait de ne pas être compris.
  • Être reconnu comme un manager plus « coopératif » grâce à sa capacité à faire émerger et à « co-construire » avec les autres acteurs, eux-mêmes pris dans des superpositions d’enjeux, d’objectifs et de contraintes.

Cette expérience a été riche d’enseignement et cela à plusieurs titres.
Sur le plan des résultats, les participants témoignent d’un apport quasi immédiat de l’atelier dans leur pratique, ceci est encourageant concernant l’utilité du regard systémique dans l’exercice des missions du managers. Avec un peu plus de recul et l’expérience que nous avons d’autres ateliers, nous pouvons identifier d’autres bénéfices tels qu’une prise de distance, prise de recul ou encore plus d’assurance face aux situations délicates qu’ils rencontrent.
Sur un plan pédagogique, nous sommes toujours à la recherche de plus de simplicité et de pragmatisme pour enseigner cette approche systémique. Sortir des aspects qui peuvent paraitre trop « théoriques » et trouver des moyens pédagogiques qui permettent un apprentissage plus aisé est un réel axe de progrès pour nous. Il faciliterait la mise en œuvre de l’approche pour la rendre plus accessible et contribuer à sa démultiplication dans les entreprises. Nous pourrions en ce sens concevoir des « guides opératoires » pour décrire une organisation ou regarder une situation d’une manière systémique sans dévoyer les fondamentaux de l’approche.

 

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